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    Interview : JR Ewing

    A: Quels ont été tes premiers contacts avec la culture Hip-Hop ?

    JR Ewing : [immédiatement] Tout a commencé avec Sidney, tout simplement. J’avais la chance d’avoir des parents qui écoutaient du rock, celui des Stones, des Stooges et compagnie. Vu que c’était l’âge, il a bien fallu que je fasse ma crise d’adolescence. Elle s’est exprimée avec le rap. [rires] Quand le hip-hop est arrivé, entre autre à la télé, forcément… On est tous un peu passé par là, même des gens comme Joey. Et puis… en fait, non. Mon premier contact avec le Hip-Hop ce n’est même pas Sidney. C’est un livre d’histoire géo’ que toute notre génération, les 35-40 ans, s’est coltinée en classe. A la page New York, il y avait en guise d’illustration une photo avec un métro graffité. Et ça je l’ai vu avant que Sydney débarque. D’ailleurs, ce livre est souvent revenu dans des discussions durant de longues nuits alcoolisées entre amis : "Non ?! T’avais le même bouquin d’histoire géo ?! Moi aussi !". On ne savait même pas ce que c’était mais ça nous a touchés.

    A : C’est plus que jamais générationnel en fait.

    JR : Oui, c’était très générationnel.

    A : Après, tu as touché à plein de choses différentes, du graffiti à la production en passant par la radio. Qu’est-ce que t’as préféré, si t’as préféré certains trucs à d’autres ?

    JR : Je n’ai pas préféré. Je vis. Je n’ai pas choisi les trucs qui me sont tombés dessus. J’ai eu la chance d’éviter les conneries des carrières de bureau de merde ou d’ouvrier. Je viens d’un milieu où il n’y avait pas spécialement beaucoup d’argent. Finalement, parmi les trucs qui me sont tombés dessus certains m’ont rapporté, d’autres pas. En tout cas, je ne fais que ce dont j’ai envie. J’fais jamais ce qui m’emmerde. Si je fais tomber quelque chose par terre et que je n’ai pas envie de le ramasser, alors je ne le ramasse pas. Je trouverais bien quelqu’un que ça gênera et qui le ramassera [rires]. C’est aussi simple que ça. 

    A : Chaque truc que tu as fait s’est donc fait au fil de l’eau, au gré des rencontres ? 

    JR : Ouais, c’est du hasard. Ca s’est passé comme ça mais il faut quand même savoir saisir les opportunités et se démmerder, surtout quand y’a du zeille-o. Si un jour j’ai des gosses je leur souhaite ça : saisir les opportunités pour faire des trucs qui leur plaisent. 

    A : Rapper, ça t’a tenté ?

    JR : En fait, j’ai commencé par ça. Enfin, j’ai d'abord essayé le break mais je crois que je faisais de la tecktonik avant l’heure [il sourit]. Je n’étais pas très doué en danse, malgré le prisme de Sidney. J’ai écrit mes premiers textes en 1985/86. On parlait de la dépouille, de nos problèmes de l’époque. Mais je crois que j’ai bien fait d’arrêter. Vu que j’écoutais vachement de rap, que Dee Nasty et Nova sont arrivés, ça m’a verrouillé. 

    Moi, je vivais dans le 77, près de Melun, dans un quartier où c’était dur niveau caillera. Il y’avait les grosses équipes de Black Dragons et compagnie, et je n’ai jamais été un gros balèze. Alors imagine à l’époque, quand tu es un jeune petit blanc au milieu de toute cette racaillitude, il fallait exister. Ça passait par conserver son blouson, vendre ceux des autres, etc. [il rit]. Bref, finalement, je me suis engouffré dans le tag. J’ai cherché à m’y faire un nom et je crois que je n’ai pas eu complètement tort. 

    A : Peux-tu nous décrire l’atmosphère de cette époque, entre autre de cette fièvre du graffiti ? Comment ça se passait, quelle était l’ambiance ? 

    JR : Ca n’avait rien à voir avec aujourd’hui. Quand on parle d’insécurité aujourd’hui ça me fait doucement rire. C’était très très dur. Je me rappellerais toujours quand j’ai rencontré Crazy JM des IZB en 86, ou peut-être 87. Il y avait encore une première classe dans le métro. Quand tu croisais un b-boy dans un wagon ce n’était jamais anodin. Tu ne pouvais pas faire semblant de ne pas avoir vu l’autre. Ca commençait toujours par de l’intimidation, des trucs du genre baston de regard. Il fallait se jauger avant de se parler. On n’était pas beaucoup en plus. 

    Et puis globalement, l’ambiance de l’époque était violente. Tout marchait en équipe, surtout la dépouille. Sur les Champs, les bourgeois paniquaient en sortant de chez Weston. Ils y allaient pourtant avec leurs parents, mais parfois même les parents se faisaient taper. C’était la même devant chez Marithé et Françoise Girbaud à Etienne Marcel. Bref, c’était pas partout la fête, alors aujourd’hui, en comparaison, il se passe pas grand-chose. Même les vols de portables, souvent ce sont des conneries à raconter aux assurances. Nous, c’était pas ça. Tu achetais une crêpe à la sortie du Palace…. il fallait voir les équipes. Même ici. [NDLR : l’interview a lieu à Odéon] Il y a 10 ans on appelait ça Crenshaw Boulevard. Le snack que tu vois là, derrière nous, c’était celui qui faisait les meilleurs poulets-œufs. Et il était ouvert toute la nuit. Quand tu débarquais vers 4 heures du matin ici, c’était devant des rangées de BMW squattées par des cailleras en Lunettes Cartier et Tacchini de la tête aux pieds. Maintenant, regarde comment c’est cool. On est là, on fait notre petite interview tranquille, et je peux même poser mon I-Phone sur la table, il va rien se passer ! [Il rigole]. Alors qu’il y a 10 ans, au même endroit, à certaines heures ça pouvait vraiment être tendu. 

    A : Paris a de toute manière beaucoup changé...

    JR : Complètement. Moi, étant affilié Black Dragons, il y a dix ans, je ne pouvais pas mettre les pieds aux Halles. C’était le territoire des Requins. Le nôtre c’était Gare de Lyon et La Défense. Le seul quartier neutre était celui des cinémas, Opéra,  parce qu’on y allait le week-end voir des films avec nos meufs. Mais sinon c’était tendu. Je connaissais des Black Dragons – et Dieu sait que je les respecte - qui allaient aux Halles habillés en boubou et en famille, parce que la famille ça ne se touche pas. Aujourd’hui, c’est pareil sauf que c’est la tecktonik ! [rires]

    A : A propos du Graff, toi qui a vécu l’épisode de la station du Louvre et les suites judiciaires qui sont allées avec, comment tu perçois la prise de risque aujourd’hui ? 

    JR : Aujourd’hui c’est puissant. Il y a deux-trois mois, je me suis permis de me faire un métro, pour le fun. Ca faisait quinze ans que je n’avais pas fait ça. J’étais avec les gens qu’il faut, en l’occurrence les UV TPK. Les gars, je dois dire qu’ils sont bien puissants quand même. Après je ne connais pas leurs motivations. La mienne c’était voir les trains rouler, voir les gens halluciner devant ton métro en se demandant si tout ça n’est pas légal tellement c’est abusé. 

    Aujourd’hui, j’ai du respect pour ces gars, parce que tout ça n’existe plus, et les mecs font quand même tout ça seulement pour une photo. Et en plus ils sont sur des quantités terribles. Moi je suis devenu une star après 100 métros vraiment peints, alors que de nos jours, des types comme Tran comptent les leurs par centaines. Et en plus dans le monde entier. Ca c’est respect.

    A: Et par rapport à la prison ?

    JR : Ils s’en battent les couilles les gars, ils font leurs allers-retours au placard et c’est tout. Moi, j’ai pas envie d’y retourner en prison mais c’est pas pour ça que je n’ai pas recommencé en sortant. Ce qui m’a fait arrêter, ce n’est pas la police mais c’est de ne plus voir mes trains rouler. Sans ça il n’y avait plus la motivation. On était là pour la sensation, mais aussi pour voir nos trucs. On n’avait ni bagnoles, ni caméras ni appareils photos. Alors ne plus voir tes graffs, tes tags... 

    En sortant de taule, après New York, je me suis installé à Amsterdam et là-bas, j’ai eu un métro qui a roulé quatre ans et demie. Quand j’y retournais, je n’avais aucune raison de prendre les transports, j’étais essentiellement dans le Quartier Rouge. Mais je les prenais quand même, simplement pour voir rouler les trains que j’avais peints un, deux, voire trois ans plus tôt. Ouais, c’était une autre époque. Je peux pas te dire si c’est mieux aujourd’hui, je peux même pas juger. Je trouve ça juste bien qu’il y ait encore des petits cons qui ravagent.

    A : Tu n’as pas l’impression que c’est devenu un délire d’initiés ? 

    JR : Ah si ! C’est pour les initiés ! De mon temps, quand tu venais ici, à Crenshaw Boulevard, il y avait des Oeno partout. Quand j’allais au Bobino, j’étais une star, même auprès des gens qui n’en avaient rien à foutre du graffiti. Ils me connaissaient simplement parce qu’ils voyaient mon nom partout dans Paris. A l’époque, on le faisait vraiment entre initiés. Avec le Louvre, j’ai été dans les premiers à montrer qu’il pouvait y avoir une médiatisation. Et c’est ce que les gars cherchent aujourd’hui en prenant des photos et en les envoyant aux magazines. Le business est comme ça de toute manière puisque les engins ne roulent plus et que ça nettoie sec. La donne n’est plus la même. Ils le vivent d’une manière, moi je l’ai vécu autrement. Chacun sa période mais tant que ça continue, je suis content. 

    A : Avec Chimiste, tu avais monté Arsenal Records, qui a donné naissance à quelques albums majeurs comme "Conçu pour durer", "Le Combat continue",  "Le Vrai Hip-Hop". Quels souvenirs gardes-tu de cette aventure ?

    JR : Quels souvenirs ? L’oseille, les putes et les chambres d’hôtels qu’on détruisait. 

    A : Rockstar !

    JR : Ouais, Rockstar. Rockstar parce qu’on a bien pris des thunes et que ça a bien baisé. J’ai un souvenir d’une destruction de chambre d’hôtel dans un palace de Montreux après le festival du jazz. C’était les Lords of the Underground qui faisaient notre première partie alors que nous, quand on était jeunes, on les écoutait et on les voyait comme des stars. Bref, vu qu’ils ouvraient pour nous, ils avaient les meufs en deuxième main. Elles  redescendaient des chambres tagguées à l’onyx sur les nibards et sur le cul. Après j’allais chercher dans la boîte de nuit de l’aftershow des bouteilles de champagne. J’y voyais Lord Jazz et Doitall qui avaient les meufs déjà tagguées et un peu ouvertes [rires]. Mais après, pas con hein, vu que j’étais avec ma femme, la chambre d’hôtel que j’ai détruite c’était celle de mon ingé’ son. Je voulais garder la mienne propre [il éclate de rire]. Ca nous a coûté cher même si je n’ai jamais payé. En tout cas, je crois qu’on n’est pas prêt de refaire le festival du jazz de Montreux [il rit]

    Cette période c’était de la bombe : tu es jeune, tout ça te tombe dessus, les meufs pleuvent de partout, on te donne des centaines de milliers de francs, tu fais des concerts en France, en Suisse, à New York, en Allemagne, que demande le peuple ?! 

    A : J’imagine que monter un label en partant de pas grand-chose, ça devait un peu… 

    JR : [il coupe] Non parce qu’on ne s’est même pas rendu compte que l’on montait un label. Au début on a voulu faire un vinyle. Il s’est un peu vendu, il a eu un peu de buzz et des propositions sont venues. Alors on a essayé d’avoir le maximum, et tout s’est enchaîné assez naturellement. Sur le moment on le vivait, on n’était jamais dans le calcul. C’est plutôt à posteriori que tu réalises que t’as fait quelque chose. Un gars comme Joey pourra te le dire, on a un peu le même parcours sur ces trucs là : ça nous tombait simplement dessus et on en profitait.

    Aujourd’hui c’est plus pareil. Il y a le téléchargement. Par exemple, je donnais entre vingt et vingt-cinq patates à un artiste par album. Non remboursable, je précise. Désormais, demande aux artistes rap l’avance qu’ils touchent sur un disque. S’ils empochent 80 000 balles ils sont contents. Et on était indépendants en plus. Même si on avait une major derrière nous, ça partait d’un bon sentiment.  Alors imagine ce qu’on touchait en amont [il rit]. 

    A : Tu es toujours en contact avec les mecs de La Cliqua ?

    La Cliqua - Conçu pour durerJR : Oui. On reforme le groupe.

    A : Justement on voulait en parler…

    JR : Je me doute [rires]

    A : Vous reformez le groupe au complet ?

    JR : Ouais.

    A : Juste pour de la scène ou il y a plus derrière ?

    JR : Pour le moment on ne sait pas. C’est comme au foot' : match par match. Pour l’instant c’est le 11 Avril à Lyon. Après on verra bien pour la suite, selon comment ça se passe.

    A : Vous avez dû négocier entre vous ou l’envie est revenue sans trop se retourner sur le passé ?

    JR : Il a fallu négocier. [rires]

    A : Les rancœurs étaient tenaces quand même, non ? 

    JR : Bien sûr. C’est normal, c’est comme ça. Même si tu es marié vingt ans avec la même femme, c’est pas rose tous les jours. Il y a des petits trucs qui traînent, je ne vais pas dire le contraire. D’ailleurs, c'est toujours compliqué. J’ai booké l’ingénieur du son ce matin en direct de Toronto. Il était 8 heures du mat’ et j’étais ivre mort. Tout est compliqué. Des trucs restent entre certaines personnes, mais c’est la vie. 

    Par contre pour le coup, par rapport à NTM, sans leur manquer de respect, ce n’est pas financier. On ne remplit pas un Zénith. Je pense qu’il y a quand même une envie. Avec les trucs comme les Myspace, on a tous été bombardés de messages. Sans être démago, il y a un moment où on sent que ça peut faire kiffer du monde, et ça c’est vraiment intéressant. Donc si ça rebondit, on verra bien… Si ça se passe comme on l’espère, on sait qu’on peut faire une bonne Madeleine de Proust, un bon kiff. Je connais des gens qui bougent de Paris exprès pour l’occasion… Et à mon avis ils n’ont pas tort, je pense que ça va bien le faire.

    A : Tu évoquais NTM. Que t’inspire leur reformation ? 

    JR : Personnellement je kiffe. Joey c’est vraiment mon pote. Bien sûr il y a de l’argent en jeu, mais je le connais suffisamment bien pour savoir qu’il n’y a pas que ça. Tu marches dans la rue, qu’est ce que tu préfères ? Qu’on t’envoie des fleurs où qu’on te mette des patates ? Tu préfères les fleurs ! Eux-mêmes savent que NTM représente quelque chose de culte. Si Joey n’a pas tué sa femme, NTM ça reste quand même un peu les Noir Désir du rap français. C’est agréable d’être aimé, et il y a une part de ça dans leur retour.

    A : Mais tu ne penses pas qu’il y a un pêché de nostalgie, de mélancolie ? 

    JR : Si peut-être et alors ? Ce sont nos plus belles années. Qui va nous jeter la pierre ? Pas les gens dans la salle en tout cas. Et tout le monde sera dans la salle. Pourquoi se priver ? Ca fait plaisir à tout le monde, c’est déjà complet même si c’était cher. Pourquoi se priver ?

    A : Le côté Canal +, Grand journal, Denisot... ?

    JR : [il coupe] Moi j’adore Denisot. Je le connais personnellement et c’est un vrai gars. Il n y a pas de souci. Je préfère que ça se reforme chez Denisot au Grand Journal, sur la plage horaire de Nulle Part Ailleurs, qui est la famille, plutôt que chez Cauet. 

    A : Tu as aussi participé à la création de Chronowax, société concentrée sur la distribution de disques mais qui a aussi œuvré dans la production et la promotion d’un paquet de rappeurs en France (Rocé, Karlito, Mehdi,…). Comment s’est présenté ce créneau ?

    JR : Quand j’ai signé mon label deal chez Barclay, dès la sortie de "Le Vrai Hip-Hop", je me suis rendu compte que la major était plus que larguée sur la distribution des vinyles. C’était avant Serato, Internet et compagnie. Avec Texaco on avait beau faire pas mal d’envois promo en direction des DJs, il en restait beaucoup qui n’étaient pas sur nos listings et qui ne demandaient qu’à acheter et jouer nos vinyles. J’étais harcelé par des mecs qui se plaignaient de trouver nos productions uniquement en CD dans pas mal de magasins. Polygram s’en sortait pas sur la distribution des vinyles. A la base, on n’a pas fait ça pour les thunes, mais juste pour que les vinyles arrivent bien dans les petits magasins. On savait même pas que quelques années plus tard on signerait en direct avec Richard Branson. 

    Il faut aussi savoir un truc, c’est qu’à l’époque, pour qu’un magasin vende les disques de majors, il fallait que le shop ait un compte avec plusieurs briques de caution. Mais tu crois que les petits magasins -de skate par exemple- intéressés par quelques vinyles d’un catalogue allaient ouvrir un compte chez Polygram pour ça ? Leur vocation ce n’est pas de vendre des disques. Et nous, on voulait pourtant que nos vinyles arrivent dans ces petits magasins. J’ai donc été voir Pascal Nègre, Olivier Caillard et d’autres, et j’ai réussi à sortir les vinyles de mon contrat pour organiser ma propre distribution. Mais vu qu’il me fallait un back-catalogue et que ma société ne pouvait pas être viable en se reposant seulement sur mes productions, j’ai fait en sorte de  mettre la main sur tout le catalogue vinyle de Polygram. 

    Le Vrai Hip-HopDerrière j’ai appelé De Buretel chez Virgin en étant sûr qu’il avait le même problème. Et là boum, rebelote. J’ai aussi récupéré leur catalogue. Cette démarche est montée en puissance, et finalement, on est devenu le distributeur officiel de Blue Note, on a fait les rééditions de tous les vinyles de Def Jam pour le monde entier. Une fois de plus, tout s’est fait petit à petit, en partant de la distribution de "Le Vrai Hip-Hop"puis des productions d’Arsenal Records. 

    A : Tu veux dire que tu ne calculais jamais à long terme l’impact de tes initiatives ?

    JR : Si, au bout d’un moment, quand ça commence à vraiment marcher, tu es calculateur. C’est obligatoire. Mais sur le coup, non je ne l’étais pas. C’est seulement une fois que les choses prennent des proportions importantes que je commence à anticiper. Par exemple, je t’avouerais quand je suis arrivé chez Virgin pour "Conçu pour durer", j’ai demandé un million, tout simplement parce que j’avais peur de pas demander assez. Dans ce cas, tu te dis qu’il vaut mieux placer la barre trop haut ; d’autant plus qu’il y avait des rumeurs qui disaient que c’était ce qu’avait touché Raggasonic. Ca nous a rendus un peu parano. C’est un milieu de requin, et si au bout d’un moment tu ne te mets pas à devenir calculateur tu te fais bouffer. Par contre, sur les initiatives, non, je n’ai jamais été du genre à tout prévoir et planifier.

    A : Le public te connaît avant tout grâce à tes mixtapes. Un vaste sujet. Quelles sont tes influences à ce niveau ?

    JR : Thug Music ! Ce que j’aime, c’est un certain type de son. Ceux qui connaissent mes mixtapes savent. C’est assez racailleux, mais après c’est tout un truc, qui est d’ailleurs celui qui manque peut-être à une grande part du rap français. A New York beaucoup de gars ne rigolent pas du tout. Tu vois aujourd’hui là-bas les gars dans leurs textes disent que si tu prends pas de ke-co t’es un bouffon. Je ne sais même pas si ça arriverait en France. Dans le rap français, au mieux un mec te dira "j’en vends". Wouah ! Quel exploit baby ! Ca me fait rigoler. Si t’en prends pas mais que tu en vends, tu vends surement de la merde. Et comment tu fais pour la goûter ? Tu prends ton petit ustensile comme dans Les Experts, et si ça devient bleu elle est bonne ?

    Attention hein, je ne dis pas que pour autant il n’y a pas de bouffons à New York. Mais il y a surtout des gros gars, qui ont un énorme vécu qui alimente forcément leurs textes. Les mecs ont grandi dans des univers de folie, dans des ghettos de dingue où ils ont appris la culture des armes. Automatiquement, au niveau de leur lyrics, ça leur ouvre un champ qu’il n y a pas ici. C’est ça que j’aime, ce côté très lyrique, où les gars en même temps se lâchent. Et vu qu’en ce moment ils sont tous sous coke, à 5 heures du mat, quand ils écrivent leurs textes, ils ont une petite montée et ils s’emportent bien. Ils finissent par lâcher des trucs qu’ils ne devraient pas dire. D’ailleurs, même les gars qui ont du buzz et qui ont pris des avances ils continuent à racailler. 50 Cent a été un bon exemple. Il a pris sa première avance et est allé acheter du crack. Ca a été l’un des premiers comme ça. Puis il s’est pris neuf bastos, tu vois ce que je veux dire ? C’est ça que j’aime et ce que je veux mettre dans mes mixtapes. 

    Le grand malheur, c’est que l’Education Nationale fait mal son boulot et que la plupart des français comprennent mal l’anglais. Bien comprendre l’anglais, c’est mieux comprendre mes mixtapes. Je cherche une cohérence entre les morceaux au niveau du propos. Tu m’entendras pas enchaîner un morceau sur un braquage avec un autre où un type explique que sa meuf est relou. Bon, de toute manière, généralement, les morceaux qui parlent de meufs relous, ils n’arrivent jamais sur mes mixtapes [rires]. Mais admettons… Je cherche à amener les choses, à les rendre cohérentes. Je ne  suis pas du genre à faire du scratch et des passe-passe. Je table tout sur le mix, d’ailleurs quand tu entends des morceaux qui sont passés dans mes tapes, après ton cerveau est conditionné pour entendre l’enchaînement. C’est un compliment que l’on me fait. Et il y a aussi ce travail sur les lyrics, afin que les titres se répondent et se fassent écho. Mais ça, peu de gens s’en rendent compte... 

    A : Pour toi, les américains n’en font jamais trop…

    JR : Non, les cainris ils n’en font jamais trop. Attention, je ne dis pas qu’ici ils essaient d’en faire trop non plus. Il y a aussi des calibres en France. Mais il y a une pudeur. Je me rappellerais toujours quand j’ai fait le clip de ‘Hardcore’ d’Ideal J avec toute la Mafia K’1 Fry. Quand je l’ai diffusé à Arsenal dans mes bureaux, ils m’ont fait "comment on va montrer ça à nos parents ?". Ca m’a choqué, vraiment choqué. Après j’adore la Mafia K’1 Fry, c’est ma famille, mais… ça m’a choqué dans le sens où en 69 les Rolling Stones faisaient 'Sympathy for the devil' dans une autre époque, dans un autre truc. Mais c’est ça ici, il y a une espèce de pudeur.

    A New York ce n’est pas ça, les gars mettent leur vie sur la table et maman est contente ou non. Ici, on est dans le rap, genre il faut respecter les mères, mais j’en ai rien foutre des mères moi. Si ta mère elle t’a fait des crasses, qu’elle t’a mal élevé, qu’elle était toxico, qu’est ce qu’il y a ? T’as le droit d’avoir des problèmes. Mais ici non. Avoir des difficultés avec sa mère, ça fait partie de la vraie vie. Plein de gens en ont. Ce n’est pas pour ça qu’ils vont la mettre dans un coffre de voiture. Mais ils ne vont pas non plus bouffer tous les dimanches avec en disant : "Oh maman" etc. A New York, tu crois que les mecs quand ils écrivent un texte en descente de coke ils finissent par se demander si leur mère va écouter leur disque et ce qu’elle va en penser ? Non. En France, c’est un peu le problème.

    A : Il y a peut-être une question de culture et de contexte ?

    JR : Bien sûr que le contexte est différent, mais il faut aussi savoir mettre ses couilles sur la table, non ? 

    A : Il paraît que tu fais tes mixtapes en live. 

    JR : Oui c’est vrai. 

    A : Tu as tes sélections en tête, et un beau jour tu te poses devant tes platines et tac, c’est parti ? 

    JR : Ouais, je fous rien. Tu sais quoi ? Là ça fait plus de cinq ans que je n’ai pas mixé en dehors d’une soirée ou pour mes mixtapes. Je les fais en live, en général, j’arrive, j’ai fait ma sélection mais je n’ai rien préparé et je mixe live le plus possible. C'est-à-dire que j’essaie de faire quasiment tout d’une traite. 

    A : One Shot ?

    JR : Quasiment.  

    A : Parce que tu préfères le côté plus spontané du truc ? 

    JR : Parce que je ne sais pas faire autrement. Parce que j’arrive, je suis ivre mort, l’ingénieur du son est saoulé : "Ah, il est quinze heures il est déjà bourré !" [il rit]. Je ne sais pas faire autrement et puis j’aime bien la spontanéité. C’est vrai que ça me fait chier de préparer les trucs. J’ai dit plusieurs fois à des potes DJs qui préparent tout que j’ai l’impression d’entendre des medleys, que j’ai le sentiment d’écouter un truc de Boney M chez Drucker. C’est trop propre ! Ca m’est arrivé sur certaines de mes mixtapes qu’il y ait un petit pet’, mais je veux rester en live, alors je garde ce petit accroc. Je ne vais pas recommencer depuis le début.

    Après, je ne vais pas non plus cacher que ça m’est arrivé sur certaines mixtapes, spécialement quand je suis ivre mort, de faire un gros pet’. Alors là, on reprend, surtout si je sens que tout le mix était parti pour être mortel. Si je foire tout en fin de session, là je repars avec l’ingé’ du son. Mais je ne triche pas beaucoup. Et à une époque, sur les premières mixtapes, on faisait même les drops en live, sauf ceux des rappeurs qu’on rajoutait. Mais sinon, Armeni Blanco était à côté de moi, et faisait tout en même temps en rigolant sur son synthé. Et j’en ai fait plusieurs d’une seule traite.

    A : Justement en parlant d’Armeni Blanco, tu as eu pendant longtemps un très bon show avec lui et Lenny Bar sur Générations. Il y avait toujours l'ambiance qui vous caractérise. Quel était le concept général ?

    JR : Hum… [il souffle] Toujours le même concept, on se drogue, on se bourre la gueule, on voit les potes et on met du son. De temps en temps les filles passaient nous voir et voilà, pas de concept. C’était spontané… après moi, je veux des sous. C’est pour ça que je mixe plus à Paris. Y’a cinq piges je prenais un bâton cinq par soirée. Aujourd’hui, on me propose 150 euros. J’adore les putes à frange et tout ça mais j’ai passé l’âge. Donc aujourd’hui je mixe en Suisse ou en Allemagne où on continue à me proposer ces prix là.

    Là, je vais partir mixer à Bogota où je crois pas que le pouvoir d’achat là-bas soit plus incroyablement plus fort qu’ici. C’est même plutôt le contraire. Et j’y vais, à ce que je sache je suis pas chargé d’une mission secrète pour libérer Ingrid Betancourt. Je me suis renseigné, je sais qu’on va pas me kidnapper. Ce sont plutôt les mecs qui kidnappent les autres gens qui me font venir [rires]. Après, les mecs savent que j’ai mes exigences spéciales. Alors pour m’huiler, ils m’amènent des gros seaux avec plein de bouteilles dedans. C'est malin, du coup, quand je suis aux platines je fais n’importe quoi. Bravo ! [rires] Et après les mecs sont encore déçus, ils se disent encore plus que je ne vaux pas le coup. Je ne mixe plus en France. 

    GRIM TEAMA : Pas mal de gars ont choisi de s'expatrier vers les Etats-Unis (Get Large, Grim Team, Sebb, etc.). Peut-on, à tes yeux, parler d'une communauté à part dans le hip-hop français ? 

    JR : Ah non. Moi quand je suis à New-York, les autres français, ils habitent tous quasiment dans la même zone, et ils sortent plus. J’en connais un paquet qui ont essayé de se réinventer une autre vie là-bas. Ca les saoule quand j’arrive avec mes mallettes avec tous les dossiers rangés sur leurs vies. Moi, j’ai pas de casseroles. Je te colle au mur direct, dès le premier soir en plein Brooklyn et après je suis avec tous les gros leur-dea qui font trois mètres sur quatre. Et là après pendant quinze jours les gars on les voit plus. Je les croise juste le matin chez le barbier ou à manger des œufs, ils se font livrer des paquets de pâtes et vivent en autarcie. [rires] 

    Non, y’a beaucoup de bouffons. Ce qu’ils ont pas compris, c’est que tu vas pas à New York pour te réinventer une vie et oublier les casseroles que t’avais sur Paris. A New York, faut que tu sois quelqu’un et t’as intérêt à faire gaffe. Moi quand j’emménage à New York, j’vais pas ouvrir une boutique de déco. Tu rentres dans le game avec les vrais gars qui sont calibrés et bien vénères alors si tu viens pour travailler dans le rap t’as intérêt à être quelqu’un. Sinon tu seras juste un petit blanc français de merde. 

    Les négros là-bas ils rigolent pas du tout, ce sont des animaux et c’est la jungle là-bas. Alors si t’arrives avec ta bouche enfarinée pour faire du rap, ça va mal se passer. Faut pas croire, y’a beaucoup de français qui payent les gens juste pour les fréquenter, placer des sons. C’est pas notre cas, mais ça existe. Moi, je mange pas de ce pain là, j’arrive juste avec mon charisme, ma verve et mon caractère. 

    A: J’imagine que tu as eu la possibilité de rencontrer pas mal de mecs intéressants, quels sont ceux qui t’ont le plus surpris, où tu t’es dit que l’image qu’ils pouvaient donner ne correspondait pas du tout à la réalité?

    JR : Peut-être Guru parce qu’on s’est foutu sur la gueule [rires]. J’étais son garde du corps sur Paris. Le gars il était ingérable et vu qu’il respecte ses chansons [NDLR : JR fait référence au morceau 'Suckas need bodyguards' que Guru a fait avec Premier sur "Hard to earn"] je me suis retrouvé à être son garde du corps officieux payé par la maison de disques et à l’emmener dans des soirées. Y’a eu un malentendu une fois avec une meuf, enfin ça s’est arrangé depuis. 

    A : Tu as un petit rôle en gangster dans le film "Ne le dis à personne" de Guillaume Canet, tu tires même dans un parterre de fleurs pour faire diversion et sors une réplique sur la qualité de la moquette en jouant à la console. Comment tu t’es retrouvé là ?

    JR : [très surpris et enthousiaste] Ah oui ! Ça s’est présenté parce qu’à la base,  ceux qui ont fait ça, ce sont mes amis. Quand Guillaume adaptait le truc, il savait comment je vivais, il m’a demandé de rectifier certaines parties du scénario. Il voulait vraiment que ce soit crédible, particulièrement aux yeux des gens qui sont dans le game. J’ai donc rectifié certaines parties du scénar’ et après ils m’ont proposé de faire une petite apparition à la Hitchcock, en se doutant que ça allait me faire plaisir. Surtout que pour les assurances il fallait que je fasse une séance d’une semaine de tir à balles réelles. Ouais, donc c’était mortel. 

    A : Vis-tu aujourd’hui de ton activité autour de la musique ?

    JR : Mouais… moins qu’avant, la musique c’est un vrai secteur sinistré aujourd’hui. Je suis obligé d’être d’accord avec les boss des majors sur le coup. Et pourtant ça n’a pas été souvent le cas. 

    La France c’est le pays où les gens téléchargent le plus. En Angleterre ou en Allemagne y’a encore une vraie consommation de disques, ici c’est dur. Alors en même temps ici ça n’a jamais acheté beaucoup de disques. Même sur les magazines, ici y’en a pas des masses qui font 400 000. Der Spiegel en Allemagne ils font ça tous les jours.

    Avec l’impact qu’Internet peut avoir, il y a beaucoup de choses à réinventer au niveau de la musique. A ce titre, l’exemple de Radiohead est super intéressant. Ils ont fait quelque chose comme un million de téléchargements en deux semaines tout ça sans passer par les majors. Il faut savoir que 60% des téléchargements qui ont été effectués l’ont été gratuitement. Sur les 40% qui restaient, ils ont récupéré 8 millions d’euros. S’ils étaient passés par une major ils auraient récupéré un truc comme 2,2 millions. Pour le moment, on est vraiment à un stade de transition, plus personne ne sait où on en est. Cette période est vraiment très dure, pour tout le monde, mais j’ai malgré tout bon espoir pour la suite. 

    Avant j’attendais tous les mardi soir les imports de New-York, à 18h00 j’avais une vingtaine de galettes, là-dessus y’avait deux-trois bombes. Aujourd’hui, je me prends vingt chefs d’œuvre par jour et je reçois 150 morceaux. Et ça c’est aussi parce qu’il n’y a plus de support physique. Après, tout ça va changer dans quelques années.

    A : On voit que le prix des galettes d’un certain nombre de mecs au départ inconnus s’est s’envolé sur E-Bay après avoir figuré sur tes mixtapes. Comment expliques-tu ce phénomène?

    JR : Ouais, c’était surtout le cas pour des indépendants entre 1995 et 1999. Je sais que des gars comme Sparrow ils se sont achetés des BMW grâce à moi. Ils leur restaient un petit stock de vinyles dans le cave, et d’un seul coup les vinyles arrivent à 300, 400, dans certains cas 1 500 euros. Les japonais, ils bombardent, ils veulent tout. Très bien, moi ça me fait monter mon buzz et eux ça remplit leur compte en banque. Si y’a des gens pour dépenser autant de thunes sur un vinyle, c’est qu’ils peuvent se le permettre. 

    Pour moi, ça fait partie d’une forme de reconnaissance. Certains de mes potes qui sont à fond dans le vinyle me récupèrent gratuitement certaines galettes que j’ai perdues depuis mon incendie et attendent que je les mette sur un Pure Premium. Ca parce qu’ils en ont un petit stock et savent qu’une fois sur un Pure Premium la côté va s’envoler sur E-Bay. Ca arrange tout le monde au final. Moi j’aime bien les business winner-winner.

    A : Si tu devais choisir un seul artiste, Hip-Hop ou non ? Un seul disque ?

    JR : Mobb Deep, 'Godfather part III'. C'est simple, tu me proposes tout le rap ou juste l'intégrale de Mobb Deep depuis le début, je prends l'intégrale de Mobb Deep. Ces mecs sont mes Elvis. Pour moi y'a Mobb Deep et le rap. J'suis bête et méchant sur ce coup, juge et partie mais pour moi Mobb Deep n'a jamais fait de merdes. Prodigy c'est le bruit de mon cerveau. Le gars met des mots sur des sensations que j'avais même pas totalement analysé. Moi c’est Mobb Deep. Point. 

    A : Prodigy et Havoc ?

    JR Ewing's The FutureJR : J’ai une petite préférence pour Prodigy mais à la base c’est Mobb Deep. Et pourtant j’suis pas fan. Je sais pas être fan. J’ai souvent été avec lui et je lui ai jamais demandé d’autographes. J’ai même parfois été dur avec lui. [rires] 

    A : Quels sont très prochains projets ? Le DVD "Metro Veteran" ? 

    JR : Depuis le temps que j’en parle de ce projet, "Métro Vétéran", je suis pas sûr que je vais le faire. [rires] Tu sais des fois j’ai une grande bouche. Franchement, j’ai pas de projets. Là, j’ai ma mixtape "The Future" qui arrive et dont je suis assez fier. C’est même pas la nouvelle garde, là je suis monté super en amont, sur des artistes new-yorkais que personne connait. La plupart de ces mecs je pense qu’ils vont mourir ou finir en taule, ils pèteront jamais. C’est "The Future" ou mon interprétation du futur… mais qui constitue aujourd’hui mon présent [rires]. Après, je vis au jour le jour donc je fais jamais de projets…

    A : T’as aussi prévu de rééditer tes anciennes mixtapes au format CD ?

    JR : Ouais, ça je vais le faire… après, je suis pas le pro’ du réchauffé moi. Ca va se faire, ça arrivera. Après je sais que c’est dans les vieux pots qu’on fait les meilleures confitures, mais bon… En vérité c’est de l’argent facile mais je suis tellement dans le son, tous les jours… je suis pris par le temps et c’est pas ce que j’ai envie de faire au quotidien. J’essaie surtout d’aller le plus vite possible sur la nouveauté et d’en faire un maximum. 

    Pour moi le son, c’est le partage. Je me rappelle quand j’étais jeune et que j’avais une galette de dingue, je la mettais sur mes platines et je disais à mes potes "putain, t’as vu ?! Non mais t’as vu ça ?!" et je remettais en arrière quitte à casser les couilles. [rires]

    A : Tu veux ajouter un truc ?

    JR : Euhh…. ouais, allez vous faire enculer. Avec tout mon amour. [rires]

     


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  • Voltaire a dit un truc du genre : l'Histoire, c'est un mensonge sur lequel tout le monde tombe d'accord... Le Hip-Hop pour ceux qu'ils n'l'auraient pas compris c'est le système D, mais pas Dépends. C'est une forme de positivisme, le Hip-Hop aujourd'hui, c'est tout l'contraire, c'est l'effet sablier, les mecs se remplissent les poche, le cerveau s'vide… (Printemps 2001) - Par Sheek (Nec+Ultra)

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    Salut Sheek ! J'aurai, si tu es d'accord, un petit service à te demander... Voilà, je suis en première, et cette année, selon une réforme de ce putain de gouvernement, on a une nouvelle matière, les TPE (Travaux personnels encadrés). On doit faire une sorte de dossier sur un thème de son choix, et moi, j'en ai profite pour pouvoir parler de ma passion, à savoir le Hip-Hop. En fait, je voudrais bien parler des sources du Hip-Hop, en france et bien sur aux States ! Le problème, c'est que j'ai que 16 ans, et forcément, j'en ai loupé des trucs ! Alors voilà, j'aurai voulu savoir si t' aurais été OK pour me répondre à quelques questions concernant ce qui se passait au tout début, quand le Hip-Hop est arrivé en France (Je sais que t'étais présent !).

    Juste savoir si tu pouvais me dire les mecs qui étaient dans le mouv' à l'époque, que ce soit au niveau du rap, du graff, ou même du break ou du deejaying ! J'aurais également pu savoir si t'aurais pu juste répondre à une sorte d'interview, pour faire classe dans le dossier ! J'imagine la tête de la prof quand elle verrait que j'ai une interview d'un activiste du Hip-Hop (The real !) de première heure ! Et franchement, ça me ferait grave plaisir ! J'aurais voulu savoir aussi si t'aurais pu m'envoyer une petit tag vite fait, juste pour illustrer, pour monter ce que c'est le HH, même sur les murs ! (Trop de gens l'ignorent !)... Voilà, je sais que c'est beaucoup demander, mais franchement si tu pouvais m'aider, ça serait franchement sympa de ta part ! J'espère que tu pourras me répondre rapidement pour m'apporter une réponse positive ! Merci d'avance !

    Julien
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    Ca m'a fait délirer de mettre d'autres souvenirs par écrit... c'est marrant... j'me suis pas foutu d'toi... t'as dquoi faire... t'auras même pas à transcrire… tout juste à corriger quelques photes... ouhouh..J'vais r'prendre 2/3 bricoles de mon site et quelques bouts d'réponses à des questions du même genre qu'on m'a déjà posé sur une mailing-list… Quand ce sera l'cas… j'dirais " sur mon site… " ou " j'ai déjà dit… " ou " comme, j'dis souvent… ", etc…D'accord ?… D't'façons t'as pas l'choix… ahahah…

    1) Salut, tout d'abord, pourrais tu me dire depuis quand exactement tu es dans le mouv' Hip-Hop ? D'où te viens ton pseudo SHEEK / PsySheek ? ; Juste pour pouvoir mieux situer par rapport aux dates du dossier, tas kel age STP ???

    Dans l'mouv'ment Hip-Hop en tant que phénomène social regroupant un certain nombre de profils, somme toute, assez semblables autour de disciplines artistiques... allez disons 83/84. M'enfin, il faut savoir que ce que l'on a appelé mouv'ment Hip-Hop n'est apparu (expression comprise) qu'aux alentours de 85/86... je crois que l'expression vient des représentants de la Zulu Nation en France... Cependant, je suis branché rap depuis 80/81 ; electro-funk depuis 82...

    SHEEK, en fait ça tient essentiellement de 2 trucs... un nom avec des S et des E parce que c'est des lettres que tu peux facilement tordre dans tous les sens en tags, throw-ups, grafs,... mais avec le recul, ça s'rait presque une fausse excuse... parce qu'un bon graffiti-artist fait c'qu'il veut ne n'importe quelle lettre... sinon l'autre truc c'est que je voulais un surnom qui signifie qqchose en français... comme en anglais... si possible la même chose... c'est l'cas... et puis comme en 83/84 c'est l'époque où j'étais souvent en TACCHINI/TACCHINI blanc... et que ça f'sait reur-ti mais CHIC au possible... et ben, voilà ça s'est imposé...

    Pour info, j'ai jamais adopté le look "b-boy"/"hip-hopien"...psySHEEK c'est pour le "fun"... le "TROUBLE" psySHEEK... mais on m'appelle SHEEK voire KEU-SHEE... depuis toujours... y'a eu pas mal de FRESHeek de posés dans l'métro aussi... du temps où la mode était aux ONEROCK, ect.. c'est-à-dire par exemple que KAZE... devenait KAZER... KAZEONE... KAZEONER... KAZEONEROTIC... KAZEONEROTICKETSHEEKINGOESONANDON, etc... chaque fois un truc différent... c'etait pour tapper des WILDSTYLEs... toute une époque... ayant eu peur de m'faire per-cho un jour pour SHEEK, j'ai changé SHEEK pour SYE... j'te parle de gueu-ta... tu vois, j'avais gardé le S et le E... c'était aussi la mode des 3 lettres lancée par les BBC (SKKI=DOE, SAHO/SEISM=ASH, JACKY=JAY, KENO=INE,...)... rapides pour les throw-ups... les bubble-letters ou block-letters,etc... en fait j'ai gardé ce gueu-ta que 2 semaines et tout l'monde s'd'mandait qui avait pu cartonner autant et aussi rapidement... mais j'm'étais fait grillé par les connaisseurs à cause du style des lettres... puis, j'ai repris SHEEK jusqu'au finish en 1988... enfin si tu regardes pas mal de mecs choississent les S et les E... : SEEN, SENS (BANDO), SKEED, SHEED, SEAN, SENZ, SEISM (ASH2),... pleins... Ouais, sinon SHEEK c'est aussi "T'AS LE TICKET CHIC... T'AS LE TICKET CHOC..."... devenu TICKET SHEEK... METRO CHOC!!! SHOCK!!!

    J'ai 31 ans...

    2) Peut tu résumer rapidement ton parcours ?

    Rapidement? Ca va pas être évident... pas que j'ai fait mille trucs mais j'vais être obligé de donner qq détails qui ont été occultés ailleurs... De plus, c'est TRES IMPORTANT, je vais juste te parler de c'qu'ont vu MES YEUX... c'est-à-dire, de MOI et LES GROUPES T.C.G./B.O.S./N.+.U.,... tous... chacun... respectivement... évitant de fréquenter trop longtemps les RUPINS ENCANAILLES, les SUCEURS de RUPINS ENCANAILLES, les MISEREUX SUCEURS DE PLANS, ... LES GACHEURS DE HIP-HOP !!!(...quoi que ce mot -HIP-HOP- commence à m'sortir par les trous d'nez...).

    Rappel... Il y a eu 2 Hip-Hop... celui des rupins c'est-à-dire des soirées dans les boîtes branchées, des vernissages, des vacances au soleil ou à N.Y., etc...(SOLO, SQUAT, SIGN, BANDO, COLT/STEPH, MODE, COME, VINCE,... et tous leurs lèches-culs...)... et celui des vraies canailles c'est-à-dire celui des fêtes de Noël et du Jour de l'An dans les entrepôts,... et d'autres plus "droits" et simplement PURS... IMPORTANT : des indices permettent de reconnaitre facilement ceux qui ont utilisé le Hip-Hop pour leur propre intérêt... aux dépends de l'ESPRIT... ces indices ce sont les photos... PLUS TU TROUVERAS DE PHOTOS SUR CERTAINES PERSONNES ET CERTAINS GROUPES... PLUS TU AURAS A FAIRE A DES MEGALOS ARRIVISTES... C'EST LE JEU... Entre parenthèses, tu peux tjrs chercher une photo de nous si tu te sens l'âme d'un Indiana Jones... J'ai vu que des mecs comme SOLO prétendent que T.C.G. représentait le sale côté du Hip-Hop... le coté "trash"?... Effectivement, T.C.G. ne fréquentait pas toute la putasserie/serpenterie mondaine des BAINS-DOUCHES (entre autres,...)... Bon, donc pour revenir à mon parcours, si tant est qu'il en soit un,... il est le suivant :

    Toute fin 70, mon père sort de prison. Je le rencontre pour la première fois. J'en fait part car je crois que son rôle sera décisif dans mon orientation musicale... En effet, il était DJ dans les années 60... et avec un poignée d'autres DJs, il a pour ainsi dire introduit la SOUL en France... quand cette dernière (la France… ahahah) en était aux débuts du yé-yé... Peu de temps après, il m'offrait mon premier electrophone et mon premier disque... 1980, découverte du rap à la radio... une curiosité à l'époque... mais la scission avec le mode classique d'expression sur un instrumental m'a conquis... j'trouvais ça déjà plus populaire... plus accessible... notions à double-tranchants, j'en conviens aujourd'hui... puisque tout l'monde veux rapper puisque (presque) tout l'monde se rend compte qu'il peut rapper... c'est ce dont se sont rendus compte les pales copieurs/plagiaires qu'on connait en France,... dès lors que le Hip-Hop a représenté un intérêt,.. passons...

    Jusqu'en 1983, j'sais même pas qu'i's'passe des choses, à Paris, qu'y'a des endroits (salles, boites) où les gars s'retrouvent pour danser, ect... Y'a même eu le premier festival Hip-Hop à 2 pas d'chez moi (Aubervilliers) et j'étais même pas au courant à l'époque... seulement l'année d'après... (84) Pendant cette période, j'me fais mon trip presque tout seul ou avec mon père en écoutant les rares émissions de radio à passer du son rap ou/et electro ; à savoir notamment , Radio 7 pour celle de Sidney : Rapper Dapper Snapper... C'est à cette émission qu'j'ai entendu Richy rapper pour la première fois... Mon père "accroche" tout autant qu'moi... ce nouveau son ancré dans le funk et/ou la revendication sociale... lui connaissait depuis longtemps les LAST POETS, etc...

    1984, c'est l'année de l'émission Hip-Hop sur TF1... avant Starsky et Hutch!!! 1984, en vacances, j'pars avec un poste et qq K7 enregistrées à partir de la radio,... j'fais connaissance d'un DJ qui m'fait écouter DOUG E FRESH... je découvre le HUMAN BEAT BOX... et là, c'est l'choc : c'est ça qu'j'veux faire... c'est magnifique cette idée de faire de la musique les mains dans les poches vides... je considère DOUG E FRESH comme mon père "spirituel" en beat-box...

    Le Hip-Hop pour ceux qu'ils n'l'auraient pas compris c'est le système D... mais pas Dépends... c'est une forme de positivisme... Le Hip-Hop aujourd'hui, c'est tout l'contraire... c'est l'effet sablier… les mecs se remplissent les poches… le cerveau s'vide… Automne 1984, à la rentrée scolaire, je pose mes premiers tags sur la ligne 7... et sur Auber... Je rencontre Skeed sur un stade... je l'entendais faire l'beat-box... pas mal... et j'l'ai "accosté"... On se rend au terrain vague de la Chapelle (LE terrain vague)... Muck est la deuxième personne que je rencontre... Entre parenthèses, avec MUCK, BOXER et BANDO on f'ra le groupe P.A.W. (Police Against Writers) fin 80… Avant de continuer, y'a eu aussi KOP pour Kontrol Of Paris... c'était en fait TCG + Meo et Joey... (dans l'genre y'a eu aussi FUP/Fuck Up Posse ; genre NTMade) qui devinrent TCG pas très longtemps après...

    Je reprends,... Au fur et à mesure des semaines qui suivent, je sympathise avec plus ou moins plein d'gars ; j'dis à chaque fois "gars" parc'qu'à cette époque fallait pas chercher les filles... Les gars, habitués du terrain, dont j'me rappelle à l'époque, ceux qu'étaient là très souvent pour pas dire tout le temps... c'est KAZE (le meilleur tagueur point de vue style ; jamais égalé...), DOZER (le meilleur smurfeur que je connaisse), EKINOX, REEN, MAJESTY, KADER, FAT, DARK, DEHY, MUCK, SKEED, ARMEL, STRAX, NEST,... bien-entendu les B.B.C. (dont SLAZE),... il en manque... désolé pour eux... par contre, j'ai vu ds divers bouquins, magazines de merde, etc... que des gens se prétendaient avoir été des habitués du terrain vague... il y a des gens qui se sont venus bien après la génèse... et d'autres qui ne sont passés que 3 ou 4 fois tout au plus... Qu'y'ait bcp de mythos, ça c'est sûr...

    Bon, je rentre rapidement dans les T.C.G. :THE CRIME GANG ; nom évocateur pour tous les intrus du terrain vague... ahaha... LE terrain vague sera le fief B.B.C./T.C.G. ; futurs B.O.S... En "marge" du terrain vague, s'entrainaient dans des salles (quand elles étaient disponibles) mais le plus souvent aux Buttes-Chaumont, ds des halls d'immeubles ou Gare du Nord, des breakeurs comme Noël et Hervé... Le duo d'assassins... bien gominés, tirés à 4 épingles,... des fois, i'f'saient un p'tit tour de scooter (bien garés) pour venir nous dire bonjour... i'passaient l'mur, saluaient tout l'monde, chariaient gentillement les "galériens" que nous étions... puis lâchaient qq préparations et phases sur la dalle carrelée (certainement une ancienne salle-de-bains du R.D.Ch) du terrain ; phases largement spectaculaires compte-tenu du niveau moyen en break de l'époque... et puis, hop... i'r'partaient après avoir "dégouté" tout l'monde... des extra-terrestres...

    Pour info, NOEL est le seul breaker a avoir défier les ROCK STEADY CREW lors de leur premier passage à Paris, aux Bains-douches... les P.C.B., BANDE A BENOIT et autres se faisaient tout p'tits... il a fait bcp de tournées... en Italie, en Espagne, au Portugal, en Hollande et dans toute la France,... il dansait déjà depuis fin 70... avec les meilleurs danseurs dits "de JAZZ-ROCK" (vulgairement appelé "STREET DANCE")... notamment dans la troupe BAOBAB formée de Patrice, Zacharie, Patrick, J.P., Marie,.. Il te suffirait de questionner Dominique LESDEMA ou MARCO PRINCE voire JUNIOR (ALBERTO) ou peut-être SOLO pour te faire attester cette vérité : "ce sont des personnes comme Patrice ou Noël qui forment la base underground en france ; question dance"...

    Il te suffirait de leur évoquer les spectacles qu'on produit BAOBAB au PALACE, à L'ETOILE FOCH, L'ADISSON, LE ROSE BONBON (l'ancien Observatoire), le REX-CLUB,... pour réveiller plein d'émotions fortes-mortes... Pour info supp., à cette époque, le frère de Noël était DJ dans plusieurs boites (on dira DISCO-FUNK)...C'est Noël qui est à la base des envolées (caoutchouc)... c'est même lui qui a inventé le terme... C'est lui qui a amené les SCRATCHS sur la tête... et tant d'autres choses... Il te suffirait de demander aux AKTUELS, "première génération", qui leur donnait des cours effectifs de THOMAS...

    A l'époque, tout l'monde se tentait un peu à tout... Breaker, "graffer", taguer,... certains s'essayaient en cachette au beat-box... en cachette parce que sans quoi, on s'fout d'ta gueule, ça fait faire des grimaces... ahahah... moi, même j'ai breaké dans la rue une fois, j'ai reçu 10 F,... c'était ma famille à la f'nêtre... j'ai tout de même inventé la coupole-cigarette qui consiste à rouler sur soi-même, les bras le long du corps... ahahah...

    Le rap à l'époque c'était seulement RICHY, LIONEL D, DESTROY MAN & JHONY GO... Note : ne comptons pas SIDNEY qui se limitait à l'"animation"... sinon, on a jamais trop entendu DEENASTY... sinon GARY "GANSTER BEAT" et DOMI RAPPER T c'était ni plus ni moins du SIDNEY ...ou vice-versa... ; Quant à IRON et SHOOZ, j'peux pas d't'confirmer que c'est de cette époque... j'suis sûr d'les avoir entendu dès fin 85/début 86 mais AVANT??? SHOOZ est/était un ami de RICHY, faudrait qu'j'me fasse confimer... (après confirmation, c'est bel et bien APRES... donc environ 1986)... C'est un peu plus tard, en 85/86, que jai rencontré un autre des tous premiers rappeurs français/en français : SENA... (qui je crois, fréquentait déjà SHUCK (futur membre de SLEO)) et fonctionnait dans une espèce de duo avec lui)... M'enfin, le rap français était respecté parce que ses protagonistes n'étaient là que pour le fun... rien ne se tramait à l'horizon... même si certains fondaient sans doute des espoirs... Pour l'anecdote, à cette même époque, j'avais écrit un rap en français... une grosse connerie... un délire pour faire rire mon frère... la musique c'était mon beat-box enregistré sur K7... j'f'sais c'rap que "live"... ahahah... une espèce de rap-parodique... ça s'appelait "Chier c'est la merde..."... p't-être qu'un émule de Freud saurait décrypter le titre...

    DONC, JE PENSE AVOIR ETE CLAIR : A PART LES PERSONNES CITEES CI-DESSUS, PERSONNE NE RAPPAIT EN FRANCAIS... NOEL S'Y METTRA EN 86... MOI EN 87/88... RICHY EST POUR MOI LE PREMIER RAPPEUR FRANCAIS... IL RAPPAIT EN 3 LANGUES : FRANCAIS, ESPAGNOL, ANGLAIS... CA M'FAIT AUSSI PENSER QUE NEC+ULTRA FAISAIT DES REFRAINS CHANTES DEPUIS LE DEBUT... 87/88 ARRIVENT LES NEW GENERATIONS MC'S, SAXO (quoique je crois qu'il avait rappé lors des "BLOCK-PARTY"s en 1986),... J'refais un p'tit break pour essayer d'rien oublier quant à qui ont pouvait entendre/avoir entendu, aussi, en "rap" français/"rappeurs" en France dans les débuts 80... et mi-80.. (j'ai mis des guillemets à "rap" et "rappeurs" parce c'est pas des mots qui, là, auront pas forcément leur sens pour ceux qui pensent le rap est arrivé où il en est aujourd'hui... en France... tombé du ciel... cadeau des dieux que seraient ASSASSIN qui disaient qu'le rap en français : "marcherait jamais!?", N.T.M. qui disaient qu'le rap français, c'était merdique ou encore I.A.M... que j'ai jamais connu...)...

    Alors 1981 : CHAGRIN D'AMOUR avec CHACUN FAIT C'QUI LUI PLAIT mais aussi PHIL BARNEY dans son émission "DIMANCHE EN PYJAMA" et qui, par exemple, dans son éphéméride fait un rap (en français) sur le saint du jour... 1982 (première référence conoté "Hip-Hop"; maxi) : B-SIDE (compagne de Bernard ZEKRI ; CELLULOID) en face B de FAB 5 FREDDY avec UNE SALE HISTOIRE rappé en français... entrecoupé de japonais!?... 1983 : BANDOLERO (invité : GARY "GANSTER BEAT") sur PARIS LATINO... 1984 (album) : DEENASTY avec PANAME CITY RAPPIN' ... mais aussi BLACK WHITE & CO avec LET'S BREAK... y'a eu aussi les P.N.Y (maxi)... puis un "gros" élan sur RADIO 7/RAPPER DAPPER SNAPPER (SIDNEY) avec RICHY, LIONEL D qui confirment leur passion pour le rap (en tant qu'rappeurs ; en français)... pareil pour DESTROY MAN et JOHNNY GO qui s'imposent vraiment en 1985... c'qui revient bien à résumer ici, qu'les seuls rappeurs reconnus au sein d'un "mouv'ment Hip-Hop" en 1985 (expression pas encore popularisée) sont RICHY, LIONEL D (qui fonctionnaient au départ en duo) et DESTROY MAN et JOHNNY GO (devenu JHONY GO depuis env. 1990 ; acronyme signifiant Jeune Homme Organisé Noir aux Yeux Grands Ouverts)... FAT (CAZ devenu LORD SALEEM) et moi étions les seuls "human beat-box" reconnus... et puis 1986 (maxi) : DESTROY MAN et JOHNNY GO avec ON L'BALANCE/EGOISTE...(ils avaient voulu faire leur face B avec un beat-box à moi mais j'avais refusé car je fonctionnais avec le DUO FANTASTIQUE (SENA et STYLE J ; 1986)).. 1987 : SERGE GAINSBOURG (invité : "GANGSTER BEAT") sur "YOU'RE UNDER ARREST"... et puis 1988 (maxi) : DESTROY MAN et JOHNNY GO avec J'EN AI ASSEZ... et NEC + ULTRA (maxi) avec JE RAP'/ULTRA HOUSE... Tout ça, c'est pour c'qu'est traçable...

    Rev'nons en 84... J'm'entraine,... j'm'entraine tranquillement au beat-box... Au terrain, rapidement les R.D.V. hebdos deviennent quotidiens... on m'demande de montrer mes phases... et les témoins disent aux autres... "Ecoute, écoute... ah, ouais... c'est l'meilleur beat box que j'connais... il est meilleur qu'untel... et même qu'untel... facile..."... Mais comme nous n'étions pas un milliard c'était effectivement facile... ça l'est encore... Et aussi, la première prestation beat box pour soutenir Destroy Man et Jhony Go au second festival à Aubervilliers... j'suis "sacré" tacitement "meilleur beat box français" par l'ensemble de la profession... ahahah... (4 pélerins...) ; français car c'était comme si Paris était la France toute entière... par exemple, dans mon entourage, personne n'avait entendu parlé de Marseille comme d'une place où le mouv'ment aurait été très présent et actif... j'me rappelle qu'on parlait pas mal de Troyes notamment grace à qq breakeurs dont Ned...

    En parallèle, j'me mets à cartonner "piano-piano" le métro de long en large... avec ou sans les T.C.G... 1985, c'est les premiers entrepôts... une bonne dose d'adrénaline... la suite on la connait : SHEEK est le tagueur le plus recherché... balances, commissions rogatoires, perquisitions,... On a tenté un duo beat-box avec FAT mais ça a duré une semaine... c'est comme ça... Avec les DUO FANTATISQUE, on était parti pour travailler sérieusement mais ça a pas duré non plus... J'ai fait des prestations pour des Fetes de la musique, des concerts SOS-Racisme, des trucs comme ça... J'te passe plein d'faits et d'anecdotes... les diverses prestations en boites... Si, un truc marrant... J'avais trouvé le moyen de faire un beat box amplifié dans l'métro... J'ouvrais la vitre des guichets d'information qui se trouvaient auparavant sur les quais... j'allumais l'micro... et ça partait...

    J'me rappelle d'un show complet + d'un rap/beat-box avec JOEL FERRATI (Timide et Sans Complexe ; avec DOUDOU) à la station TROCADERO (le Trocadéro était aussi une "base de repli", l'été... ahahah) où les gens se sont tous levés et ont applaudis longtemps... Ah, si y'a aussi eu... été 86... les partys en plein air au terrain vague... DEENASTY venait avec groupe electrogène (prété par DJ JO via son père), platines, table/mix,... le matos et les disques étaient ramenés en voiture par Noël+Jo/son père... ils branchaient l'tout,... et ça partait... bons souvenirs... les flics ne venaient pas nous emmerder... des journalistes/sangsues... oui, mais pas d'flics... ou rien d'mortel... A ces partys, j'me rappelle avoir fait un beat-box pour Richy, que je n'connaissais pas personnellement...

    1986, après avoir fait des pieds et des mains pour trouver l'argent, j'achète ma première boite à rythmes... Avec, plus tard... j'ai fait la première programmation pour le premier texte d'NTM... au temps où NTM n'était qu'un groupe de tagueurs (dont j'ai fait parti depuis le premier jour...)... Rares et convoités étaient les personnes possédant un tel engin... Aux alentours de 86/87, on a créé "Réalité"... c'était une idée de collectif (pour reprendre l'expression utilisée à l'heure actuelle)... "Réalité" c'était Richy, Noël, DJ JO et moi... Deenasty et Lionel D auraient du être de la partie... Ca a clashé a cause de l'ambition de JO... négative pour le groupe ... Il faut reconnaitre que JO était en avance question programmation musicale... On avait qd même fait une espèce de show-case dans une boite de Barbès... fallait voir les TR-808, TR-909, TR-727 et 505 chainées en midi démarrer quand il appuyait sur PLAY... ahaha... J'sais plus trop qd par rapport à "Réalité" et "Nec+Ultra" sous la forme Noël, Richy et Jo... parce que c'est confus... mais à 2 reprises, avec Nec + Ultra, on a fait des concerts en Suisse... Eux font 2 fois La Cigale... En parallèle (toujours), j'avais carrément défoncé chaque rame de chaque ligne de métro...

    Vers 87, je crois, on arrive à l'époque du Globo (Chez Roger- Boite Funk)... C'était bien d'avoir initié ça... puis ça a légèrement tourné au vinaigre,... Bref, passons... J'y ai fait qq prestations qui ont assis ma réputation... Le Globo ça a été l'après Champs-Elysées, Bataclan (de la Grange-aux-Belles), Forum des Halles, Paco Rabanne, partys du terrain, Studio A, Chapelle des Lombards,... En 87, j'ai fait un show de beat-box au Festival de Arles... y'avait aussi Fat... En 87/88, y'a 3/4 aut' trucs comme une émission "Décibels" (enregistrée à Rennes) spécialement dédiée au Hip-Hop français de l'époque... Nec + Ultra y est passé, Sheek vite fait, Destroy Man/Jhony Go, Lionel D,... ; à cette époque, aussi, T.C.G. "forfaitant" avait été suivi par une équipe de "journalistes" menée par Maria Roche...

    Le souvenir le plus "drôle" c'est Maria Roche qui tient à tout prix à filmer T.C.G. à l'oeuvre dans un entrepôt tout en disant un truc du genre : "euh,... si vous vous faites attraper, on est pas ensemble..."... ahahah, ces journalistes quelle bande de fouilles-merde... Le "reportage" : "PARIS GRAFFITI" nous était entièrement consacré + MEO... Il est passé sur LA CINQ ; émission "REPORTERS"... La conclusion de Maria Roche était de dire que les bandes de tagueurs lorsqu'elles se croisaient engageaient des bagarres sanglantes... j'ai jamais vu ça d'ma vie... mais c'était certainement un truc pour effrayer la populasse... un truc de journalistes... un ressort dramatique... ;

    En 87, j'ai fait (avec Deenasty et un danseur dont je n'me rappelle plus le nom) un p'tit spot TV pour CONVERSE dans le cadre de la fête du 100ème d'ACTUEL à Gare de Lyon... En 87/88, trois anciens membres de "Réalité" sont devenus la formation définitive de "Nec + Ultra" : NOEL, RICHY & SHEEK... "NEC PLUS ULTRA" c'est pour l'idée que "nous sommes prêts a donner le meilleur de nous-même... dans les meilleurs délais..." De temps à autre, avec Nec + Ultra, on répétait le samedi matin dans une salle à Belleville... un ampli, un micro...

    1988, on a enregistré "Je rap"... l'album aurait du suivre... quasiment tout était prêt... Richy a écrit une bonne partie du texte. Noël a fait la musique selon des idées qu'il avait capturé "à la bouche" (sans instruments) sur un 4 pistes K7... En studio, j'y ai fait l'beat box uniquement... phase beat-box/parlé... d't'façons, j'avais rien préparé comme d'hab... ah, ouais, parce que j'ai toujours improvisé mes shows... bien sur, j'avais travaillé plein d'phases mais j'savais jamais comment j'allais enchainer... c'est à la réaction des gens... parce qu'y a des trucs compliqués à faire qui ne trouvent pas d'écho... et des trucs tout balourds sur lesquels les gens sautent en l'air... c'est comme ça... en général quand ça claque bien dans l'oreille, ça suffit pour les gens... c'est comme ça...

    Bon, comme je le précise sur "mon" site JE RAP c'est "un morceau commandé par deux grosses merdes de producteurs "rockeux" et ringards : Paul BOUSSARD et Paul BANES... Un morceau dont la maquette a été réalisée à la bouche sur un 4 pistes-K7 et rejouée plus tard en studio par le "clavier" du groupe "Les musclés" (Chamboisier) dans un studio appartenant en partie à Karen Cheryl... Une catastrophe, quoi! Plus jamais ça! "... Les producteurs, qui cherchaient plutôt dans le milieu branché" bain-doucheux", ont été introduit à NEC + ULTRA par LES MICES (premier groupe de rap français féminin)...

    JE RAP est tout d'même le 3ème maxi de rap français après les 2 de Destroy Man et Jhony Go... celà nous vaudra d'être jalousé par les NTM notamment... qui iront jusqu'à reprendre le titre pour l'"attaquer" sur RAPATTITUDE... ça découle d'une de leurs techniques éculée ; à savoir : "Comment surenchérir dans le bruit pour rien quand on a pas d'talent autre que celui d'le faire croire!!!"... Sur mon site j'explique que "Je rap'" est aussi le nom d'un morceau des "Niques Toi Même" qui figurait sur la compilation RAPATTITUDE (1990,... 2 ans après)... une pseudo-attaque contre "N+U"... un coup d'épée dans l'eau, en fait... mais qui démontre que certaines lois sont universelles... les puristes profonds naissent pour rester dans l'ombre... les opportunistes courrent après les "plans",... et font parler d'eux en faisant beaucoup d'bruit pour pas grand chose...

    C'est, avec le recul, bien mieux comme ça... Chacun son illusion... Provo... Réponse à la provo... C'est l'principe de la communication... TOTALE liberté d'expression pour tous... "J'explose" sous-titrée "Je rap' puis j'explose" est un morceau écrit par "N+U", à environ la même période, façon "freestyle" à la suite d'une nouvelle provocation des "Niques Toi Même"... en direct sur Radio Nova. "J'explose" figure sur le "Best of.... psyShEek..." et il est téléchargeable sur ce site... à partir de la page : http://perso.club-internet.fr/psysheek/bestofps.htm ou directement de ce lien : SHEEK vous N. (Je rap' puis J'explose ; Que ça vous plaise ou pas... Petit patapon) + Texte .

    Ce morceau permet aisément de se rendre compte que "N+U" maîtrisait le domaine "rap" quand le reste de la scène française n'en était qu'aux ânonnements... ...Anonnements... Après 10 ans, j'ai pas franchement l'impression qu'le rap ait évolué,... artistiquement parlant! La scène "rap français" commence vraiment à faire penser à la "cour des miracles" ou à "l'île du Dr Moreau"..." On fait les 2 premiers festivals RAP FRANCAIS à l'Elysée-Montmartre... avec des costumes, une mise en scène et une nouvelle version GOGO de JE RAP'... tandis que tout l'monde s'escrimait + ou - à vouloir faire du Public Enemy... fallait voir ça... SOLO avec une pendule autour du cou, les NTM qui gueulaient à s'en faire peter les veines du cul... les revendications de mecs qui croient qu'ils auront l'"droit au bonheur" en restant assis sur leur derrière... etc... c'est cet aspect "pleurniche" qui a toujours la part belle dans le rap actuel... UNE NOTE, ASSASSIN ET NTM ONT SENTI LEUR VOCATION DANS UN RAP-NOUVELLE ECOLE DES L'APPARATION DES BEASTIE BOYS... AUTANT DIRE DU RAP-PUNK... D'AILLEURS, JE NE SUIS PAS ETONNE DE CONSTATER QU'AUJOURD'HUI LES "JOURNALISTES HIP-HOP" (R.E.R./L'AFFICHE) QUI LEUR LECHENT LE DERCHE SONT D'ANCIENS PUNK...

    Pour rev'nir à "Je rap'", on était qd même loin de trouver ça brillant... on avait tous les meilleurs textes sous l'coude... Je le redis, "Je rap" était une oeuvre de commande de nos producteurs... ce morceau était censé préparer le public au rap ; sujet qu'il ne connaissait pas, c'est vrai... Avec le recul, c'était, à mes yeux, une erreur... pour preuve, nous avons, par la suite, feint la panne d'ardeur afin que nos prods, à terme, nous lache le grapin... En 1988/89, nous avons fait la première prestation/interview dédiée à un groupe français... pour ouvrir la voie au reste de la scène française... dans l'émission qu'avait Deenasty sur RADIO NOVA... Nous avions déjà filé un bon coup de mains aux MICES, IZB, LADIES NIGHT...

    En 1989, Philippe Ascoli (Polydor), notre directeur artistique nouvellement attitré (futur D.A. de MC SOLAAR et RAPSONIC/RAGGASONIC) nous dit qu'"ILS (ils? qui? je sais tjrs pas) ont décidé de lancer le rap en France... qu'ILS/ON vont/va faire entrer JE RAP dans les 10 premières places du TOP 50..." Seulement, nous n'voulions pas ressortir "Je rap'"... Nous avions continué à travailler sur le style, les textes... et nous avions fait des enjambées de géant ne serait-ce que par rapport à l'ensemble des groupes de rap français... Ascoli nous a demandé de juste retoucher la musique pour la "réactualiser"?... Nous, nous voulions faire nos nouveaux titres... tels quels... Il a fini par nous faire entendre que dans tous les cas, il mettrait des "covers" (pantins) pour rapper à notre place en télé... C'est dire, s'il tenait à notre morceau... Dès lors, nous nous sommes montrer très menaçants (on dira vis-à-vis de son intégrité physique) et il a fini par nous bien vouloir nous lâcher...

    On a pu se rendre compte, avec MC Solaar par la suite, que son plan "lancement commercial du rap et, par conséquent, du rap français" était bel et bien à l'ordre du jour... dans l'industrie du disque... Nous avons enchaîné le clash avec nos producteurs ringards... mais assez lucides pour voir en surtout en Richy la poule aux oeufs d'or... Nec + Ultra ont donc décidé de se produire eux-mêmes,... après ces épisodes... C'est cette année là aussi que nous avons fait un mini-concert rue Rébéval (19ème) dans un amphithéâtre en plein air… y'avait tous les mecs qui comptaient pour le mouv'ment, d'une manière ou d'une autre,… j'suis sur qu'i'z'ont jamais du s'en remettre de ces 4 morceaux et du show d'beat-box auxquels i'z'ont eu droit… Deenasty était aux platines… Tout l'public était surexcité… C'était la dernière scène de NEC + ULTRA… pourtant en 1989, NEC + ULTRA est donné meilleur groupe de rap français aux Triomphes du Hip-Hop… par votes… dans l'ZULU LETTER de Candy… seul fanzine de l'époque… Moi-même, en tant que SHEEK, j'suis donné meilleur Human Beat Box avec 98% des suffrages… J'avais déjà gagné haut la main en 1988…

    Jusqu'en 90, nous avons fait quelques bricoles (clips, pubs, musiques pour génériques) relativement "confidentielles"... Ah, ouais, on a aussi été interviewé pour le bouquin "FREESTYLE"... 5/6 heures d'interview enregistrées ont été résumées en 1 page et demi d'un bouquin format poche... et encore n'avaient été utilisés que les propos servant une orientation particulière... Je crois que c'est en 1990 que nous avons monté le CERCLE 19... CERCLE 19 c'est Nec Plus Ultra + plusieurs potes du 19ème arrondissement : FABIEN, TCHEKO, REGIS, CYRIAQUE, PIERRE, PATRICE,..., PHIL B, TEDDY,... TCHEKO dessine, la plupart des autres dansent ou rappent à loisir... voire les 2... voire font c'qu'i'z'ont envie et sont nos potes... c'était une association loi 1901 dont le but est de favoriser la création artistique des jeunes dans le 19ème... On avait élaboré ça pour essayer d'obtenir des salles de répétitions... m'enfin, j'dis "c'était" parce qu'en tant qu'association ça n'a jamais été réellement actif... seulement le groupe CERCLE 19 existe toujours...

    Après 91/92, pour ma part, j'ai continué à concrétiser certaines pensées en textes... alors que Noël, par exemple, se concentrait sur "donner toutes les possibilités matérielles au groupe avant de (re)commencer quoique ce soit"... Chacun de nous a toujours travaillé,... on a acquis doucement un home-studio... NOËL A TOUJOURS INSISTER SUR LE FAIT QU'IL NE NOUS FALLAIT "TRAVAILLER" AVEC DES GENS A LA "PATTE GAULOISE"... En 1997/98, pour des divergences, (on dira pour convenances personnelles) Nec + Ultra s'est séparé... de corps... pour moi, l'esprit flotte toujours... inaltérable... EN FAIT, C'QUE J'VEUX DIRE C'EST QUE NEC PLUS ULTRA N'EXISTE PLUS DANS SA FORME : NOEL, RICHY ET MOI... POUR L'HEURE C'EST NOEL ET MOI... RICHY PARTICIPE GRACE A QUELQUES TEXTES QUI SERONT ENCORE REPRIS... CA C'EST POUR L'FUTUR...

    Rev'nons en 1998/1999, je "maquettise" qq morceaux avec un sampler bas d'gamme... en fait le plus bas d'gamme de l'époque... un jouet... (33K, mono, 8 échantillons max.) Cependant, je continue de dire autour de moi que "Je sortirais JAMAIS RIEN..." En 2000, grâce aux encouragements et au travail d'ingénieur de son/mixeur de Noël, on récupère ts les échantillons du "jouet", on séquence le tout... et on enregistre les voix... pour l'album que tu connais... j'en suis auteur/compositeur/interprète... Noël s'est occupée de toute la partie son après "compo"... m'enfin "compo" est un bien grand mot... pour moi, la musique n'est qu'un support... c'est le rap et la personnalité qui comptent... pour info, certains textes datent de 11/12 ans!!!??? Puis fin 2000, je mets à disposition gratuitement l'album via un site perso. internet... je fais une centaine de copies artisanales et les distribue de main à la main... à des amis... et quelques personnes qui connaissent certains de mes "ennemis" parmi les rappeurs français...

    Début 2001, je n'ai obtenu que du soutien et des encouragements... pour avoir donné la fessée à un bon nombre de jeunes premiers... ...et c'est pas fini... NEC + ULTRA CONTINUE... ET A CHOISI DEPUIS LONGTEMPS DE FAIRE RESPECTER, PRESERVER UNE CERTAINE ETHIQUE SANS PASSER SOUS LA LUMIERE DES FEUX DE LA RAMPE... NEC + ULTRA PEUT EXPLOSER DANS N'IMPORTE QUOI, N'IMPORTE OU, N'IMPORTE QUAND... NOUS SOMMES UN PEU COMME CE MAGMA SOUS LA CROUTE TERRESTRE... C'EST BIZARRE QU'IL FAILLE SE SENTIR FORCE DE LE PRECISER MAIS... EXISTER POUR NOUS C'EST PAS SEULEMENT FAIRE DE LA MUSIQUE... SEULE LA MORT POURRA NOUS EMPECHER D'EXISTER... TEL QUEL... QUOIQU'ENCORE... UN PEU D'PRETENTION : HEUREUSEMENT QU'ON EST LA POUR REL'VER L'NIVEAU... CA PERMETTRA P'T'ETRE AUX AUTRES D'AVOIR L'IDEE D'PAS BAISSER LEUR GARDE... TROP VITE...

    3) T'as commencé par quelle discipline (Rap, graff...) et à quelles disciplines as tu touché depuis que t'es dans le Hip-Hop ?

    Comme je l'ai dit plus haut, j'ai commencé par le human beat-box... puis j'ai bcp tagué... Vers 1986/87, Kaze et moi (T.C.G.) voulions nous lancer dans l'graf'... j'en ai fait qq uns (1 douzaine au max., en fait)... le reste était essentiellement des block-letters... Enfin, c'est dans ce but qu'en 1987 - se lancer dans l'graf' - a été créé B.O.S.- BOSS OF SCANDAL(Z) (les vrais)... B.O.S. c'est l'association B.B.C./T.C.G. : les gardiens du terrain vague de la Chapelle... Comme tu dois l'savoir le nom a été sucé par Joey et Spank pour BOSS OF SCANDALZ STRATEGYZ... Joey et Spank ont été T.C.G. mais jamais B.O.S... Et puis vers la même époque, j'ai "poussé" l'rap... en commençant dans le groupe Réalité... Pour rev'nir au graf, pour l'anedocte, 2 années consécutives j'ai fait des grafs pour la déco. de la fête de l'Orphelinat de la POLICE... un thème était : "Brisons le MUR de l'égoïsme"... i'z'en était très contents...

    4) Je sais que t'es contre le Hip-Hop actuel, mais en fait, est ce que c'est le fait qu'il y a maintenant plein de thunes, ou est-ce tout simplement ce qui se fait qui t'écœure ?

    Je n'suis pas à proprement parlé contre le Hip-Hop actuel... si je me mets à généraliser et à me placer dans l'angle "grand public"... là, oui, je suis contre... M'enfin le Hip-Hop dit "pur"... mais dogmatique... enfermé dans son bocal, sous son étiquette ne me convient pas, non plus... Maint'nant, les histoires des thunes y sont pour bcp... le Hip-Hop que je connais, j'l'ai vu grandir sans thunes...

    5) On sait aussi que tu n'as quasiment jamais accepté un franc pour exercer ta passion, mais est-ce que tu crois pas que c'est finalement dommage de pas profiter de l'opportunité de pouvoir vivre de sa passion ?

    Non, je ne pense pas que ce soit dommage... Je suis un "grand" utopique... et tant que le système ne me conviendra pas... je l'accepterai du point de vue d'un esclave dans une dictature... je sais, c'est très extremiste... m'en même tps je ne cherche pas à imposer mes idées... comme je dit souvent : je les expose avec véhémence... certainement pour tenter d'obtenir une réaction dans l'camp d'en face... l'idée de rééquilibrer les forces en présence... j'en sais rien, m'enfin j'essaie de toujours rester cohérent avec moi-même sans me laisser dépasser par la "mythonerie" et la complaisance... Ca veut dire que je veux travailler... je l'accepte comme une contrainte... m'enfin, c'est pas non plus l'bagne... et puis à côté d'ça... sans aucune connexion entre les 2, je peux rester intègre dans mon expression "artistique"... et j'me fous de ce qu'on en pensera... vraiment... je rap à loisir... sans compromis ni obligations... c'est un peu une histoire de vie professionnelle/vie privée... Maint'nant, j'ai un boulot... qui m'permet d'vivre décemment... j'ai pas besoin de plus... ni même de renommée... les gens qui m'aiment, m'aiment vraiment... ils n'm'aiment pas pour mon image...

    6) Laissons maintenant tomber le coté pécunier pour parler de ton style et de ton rôle au sein de Nec+Ultra... Nec+Ultra a remporté de nombreux contests avant 1990, souvent devant des groupes comme assassin ou NTM. Comment peux tu expliquer que finalement, Nec+Ultra soit resté inconnu du grand public et n'ait pas vraiment réussi à percer ?

    Nec + Ultra n'a pas "réussi"/"percé"?... C'est tout à fait relatif quant à la notion péjorative ou non que l'on donne au terme "réussir"... J'dirais que Nec + Ultra A REUSSI A NE PAS REUSSIR... Nec + Ultra n'est pas un groupe d'envieux ou d'avides... Dès que le mouv'ment (immobile) français s'est montré sous son jour sombre, nous nous en sommes extrait... Je n'te f'rai pas de démonstration pour te convaincre plus avant parce que je n'aime pas manipuler les "si" et JE SAIS que "si" nous en sommes là, chacun de son côté ou ensemble, c'est qu'c'est c'qu'il devait advenir... c'est bête comme chou mais aucun de nous 3 ne sommes le genre à suivre un modèle qu'on nous présente comme LE modèle à suivre... donc, voilà,... t'as un album gratuit, des réponses assez détaillées à tes questions alors que tu travailles pas à R.E.R ou Radikal... et que d'autres ne verraient pas l'interêt qu'ils auraient à te répondre... tant ça leur ferait perdre leur temps... si précieux... puisque comme on voudrait nous l'faire croire "le temps c'est d'l'argent" alors qu'c'est tout au plus du temps... ç'est à dire, RIEN, au fond... m'enfin, j'm'égare... parce que REUSSIR est un mot qui a tendance à m'énerver... et PERCER tout autant... bcp ont REUSSI... à seulement faire c'qu'on attendait d'eux : coller à un cliché...

    7) T'as vraiment un style particulier (Qui déchire par ailleurs...), quelles sont les personnes qui t'ont le plus influencé ? Tu kiffes plus le style ricain ou le style Français ?

    Merci du compliment... le pire/meilleur reste à venir... pour un éventail plus complet... Les personnes qui m'ont le plus influencé sont MELLE MEL et KOOL MOE DEE... ULTRAMAGNETIC MC'S+TIM DOG m'ont influencé aussi... MELLE MEL, c'est lui qui m'a vraiment fait dire : c'est ça (pour moi) le rap... du temps du morceau BEAT STREET! Le style français, soyons clair... c'est le style de la négation... c'est-à-dire qu'avec une culture littéraire comme la notre, j'ai du mal à comprendre... qu'y'ait pas eu des mecs qui fassent de beau textes boulversants... mais je sais pourquoi... en fait, tout est lié à la personnalité... je tiens, à préciser que je ne me mets dans la balance quand je tiens ces propos... je n'me compare pas...

    En effet, pour tout dire, j'aime bien c'que j'fais mais sans plus... j'te parle du résultat... par contre, j'apprécie davantage les moments de création... quand tout se génère... les idées... et la providence en terme de création... quand une idée s'impose d'elle même... cette espèce de lucidité vis-à-vis de tout ça peut troubler... mais c'est toujours cohérent avec c'que je dis d'habitude... quand, j'dis "j'aime c'que j'fais mais sans plus" en même temps, j'y crois assez et ça a eu assez l'temps de mûrir pour en avoir choquer plus d'un... et c'était un peu l'but... Franch'ment si on m'f'sait écouter mon album TEL QUEL mais fait par qqu'un d'autre, j'suis pas sûr que j'aimerais... ahahah... même si je pense qu'il fallait l'faire, j'pense, encore une fois, qu'y a mieux à faire, que ça aurait pu être bien plus violent dans tous les sens du terme (techniquement, etc...) mais p-t-être c'qui m'ennuie, au fond, c'est qu'ça suffit pour rabattre l'abattant (des chiottes...) De plus et peut-être le pire... le style c'est justement LE style c'est-à-dire le MONO-style... parce que j'ai vraiment l'impression qu'i'font TOUS la même chose... et TOUT LE TEMPS... j'sais pas, j'veux bien croire qu'on m'ait jamais fait écouter les bons trucs... m'enfin, j'reste encore sur ma faim... Chez les anglo-saxons, j'donne toujours plus ou moins la même liste ; à savoir :

    Last Poets, Gil Scott-Heron, Grandmaster Melle Mel + Furious 5, Kool Moe Dee, (Treacherous 3), KRS-1 (B.D.P.), Chuck D (P.E.), Saul Williams, Kool G Rap & Polo, Eric B & Rakim, Big Daddy Kane, Heavy D (and The Boys), Tim Dog, Kool Keith (Ultramagnetic MC's), Grandmaster Caz (Cold Crush Brothers), Fearless 4, Whodini, Pumpkin, Funky 4 +1, Lovebug Starski, Busy Bee, Spoonie G, Full Force, Kurtis Blow, Dr Jeckyll & Mr Hyde, U.T.F.O., LL Cool J, Run-DMC, Roxanne Shanté, Twista, Mystikal, Busta Rhymes, Chubb Rock, Lakim Shabazz, Dana Dane, Slick Rick, Pumpkin, Masterdon Committee, Pebblee-Poo, Stetsasonic, Jurassic 5, T LA Rock, Mums, Zack de la Rocha, Pharoahe Monch, Ecrof, Rammelzee, Schoolly D, Captain Rock, Soul Sonic Force,... Doug E. Fresh, Biz Markie, Rahzel (Roots), Greg Nice, Doc Nice (Fat Boys), Ready Rock C, Wise, Scratch, ... Kool Herc, Red Alert, Grandmixer D.ST., Grandmaster Flash, Jazzy Jay, Cash Money, Moe Love, Marley Marl, D.J. Mark (The 45 King), Mr Magic, Scratch On Galaxy, D.J. Cheese, ... Afrika Bambaataa & The SoulSonic Force (Arthur Baker & John Robie), Planet Patrol, Newcleus, Aleem, The Latin Rascals, Mantronik, Kraftwerk, Freestyle Workers (T.N.T. prod.),...

    Malgrè tout ça, je sais, par expérience, que bcp s'raient encore à même de s'dire : "mais, putain, c'mec là... il aime quoi?..." donc je te "colle" ma réponse à un gars qui m'demandait : "Je voulais savoir comment (selon toi) on peut faire pour déterminer, dans le cas du rap ricain (parce qu'en france c'est facile de faire le tri), si un groupe de rap est hip-hop ou si c'est juste un groupe de pantins qui se mettent au rap, voire de mecs qui, comme tu disais avant "font" hip-hop mais ne le sont pas." Ma réponse a été la suivante :

    Donc (selon moi effectivement, tu fais bien d'le préciser) ça s'passe comme ça... j''te fais une analyse de c'qui s'passe en moi. Bien souvent, y'a un son... i'm'interpelle ou pas mais j'm'en fous... j'attends le RAP... Alors, là, t'as un rappeur qu'arrive et qui scande son texte... Et sa voix/son ton m'interpelle ou pas... J'me dis "oh, là, c'est trop bouffon..."... ça c'est la plupart du tps... aucun charisme... aucune noblesse... que de la nonchalance sous psychotropes... ...Ou alors j'peux m'dire "OH, LA, CA A PAS L'AIR DE TROP RIGOLER!"... ça c'est qd j'ressens qu'le mec s'fout pas d'ma gueule, de la gueule du monde tel que je l'idéalise... un monde de bonne volonté... pas de sabordeurs... un monde neuf... Mais la voix/le ton ça suffit pas du tout... y'a des cliques de gueulards qu'impressionnent le monde... mais pas moi... ne m'impressionne pas le despesoir camouflé menant à la négation de la vie...

    Je me méfie comme de la peste des artistes qui prétendent arriver avec une conscience (un mot facile à utiliser),... une lucidité par rapport à leur "oeuvre"... et jouant tout provo. en laissant l'public... se faire une idée... la musique c'est c'qui sert à faire les marches militaires et avec l'imagerie aujourd'ui, en plus... l'amalgame et la confusion... c'est un carnage pour l'esprit critique... Il faut l'énergie... la vie.. Il faut d'l'énergie contrôlée dans l'style... le débit... la manière de scander... (ce que tt l'monde appelle le "flow"... nuancée de la "vibe"...)... ... et là, faut d'la variante, d'l'originalité, de la fantaisie, qq chose qui s'rait lié à la personnalité... appuyée... une signature... de la largeur, de la franchise...

    Quand je suis accroché à c'niveau là, il faut qu'je comprenne le texte... alors sans tout prétendre comprendre... globalement quand l'artiste se prononce de façon non conforme à la norme... de façon à ne pas devenir le porte drapeau de la connerie... celle qui enferme l'esprit, celle qui permet de controler les gens... aux mêmes depuis des millénaires... ben, j'suis presque aux anges... Il arrive qu'un bouffon soit supporté niveau son et j'me dis ça c'est bon pour les soirées... pas les miennes... mais, je sais qu'ça marchera et c'est tjrs le cas... Quand un morceau est trop bouffon, j'passe à un autre... et quand l'autre est pareil j'fais un dernier essai... mais y'a jamais trop d'chances pour qu'ca change... en général c'est 3 fois l'même morceau... ahahah... Quand y'a ts les ingrédients qui m'interpellent (ou au moins 3 sur 4... d't'façons c'est très abstrait parce que qd l'énérgie créatrice est au RDV, par exemple, je juge pas le support musical d'un artiste... si c'est dont il avait besoin pour cracher ses idées en confiance...) et ben là, ça devient une référence dont j'parle...

    Quand y'a rien d'tout ça, j'dis qu'ça pue... Et j'm'en retourne écouter une chanson d'AMOUR... chantée par de VRAIS chanteurs... parce que de vrais artistes...de nobles chevaliers servants d'un mot qui n'me parait pas galvaudé qd il sort de leur bouche... Certains penseront MIEVRE... et ne connaissent que l'AIGREUR en guise d'AMOUR... leur révolution, il la font en piétinnant dans la surface au sol de leurs chiottes... (encore, elles...) Voilà...

    8) T'es plutôt critique au sujet de ce qui se fait actuellement, est-ce que tu arrives quand même à kiffer quelques nouveaux sons ?

    Nouveaux sons? en 2000, j'ai acheté KOOL KEITH, JURASSIC 5 et des bricoles... j'aime MYSTIKAL parc'qu'il m'semble fou... et il a du style... qu'on l'veuille ou non... en 2001, j'ai acheté SAUL WILLIAMS... Je n'fais que réécouter des "vieux" trucs... mais j'écoute surtout bcp de SOUL/FUNK... et plus trop d'rap...

    9) Est ce qu'il t'arrive encore aujourd'hui de sortir pour taper quelques freestyles ou alors pour aller tagger ?

    Freestyles?... oh, mon dieu, non!... j'préfère nettement un mec qu'arrive avec son morceau "carré" et qui raconte pas n'importe quoi avec toutes ses phrases finissant par une rime en "é"... (j'ai trop galér"é", dans la misère, je suis n"é", quand j'suis en train d'rapp"er&qu

    Interview récupéré sur le site forumhiphop.com (désolé pas de photos mais y en a pas de sheek


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    À écouter absolument Madj revient sur le développement de la culture hip-hop et autre sous-culture. Une interview riche en culture, avec un ancien d'assassin productions (qui n'existe plus depuis 2005), et qui a près de 20 ans au compteur dans le hip-hop . L'interview est audio et dure près d'une heure donc prévoyez un peu de temps. Par contre on ne peut pas la télécharger donc en gros c'est à écouter uniquement par internet.  Rencontre avec Madj

     


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